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Madiran (1/2) : le traditionalisme en un mot

À l’occasion du dixième anniversaire du rappel à Dieu de Jean Madiran, grande figure intellectuelle de la France catholique, Yves Chiron nous livre une biographie détaillée d’un homme dont la vie réunit à elle seule bien des épisodes de l’histoire religieuse contemporaine. Au long des 570 pages de l’ouvrage, on découvre ou retrouve Jean Madiran, personnage public, mais on lève aussi le voile sur Jean Arfel, homme discret et peu enclin à parler de lui-même.

 

Enfance et formation : se faire un(des) nom(s)

Dans une première partie consacrée à l’enfance et la formation du personnage, l’auteur dresse le tableau d’une jeunesse libournaise et bordelaise catholique : scoutisme, enseignement religieux qui aurait dû se dérouler sans anicroche mais qui révèle déjà une personnalité hors du commun.

Ces chapitres intéresseront en particulier pour ceux qui ont fréquenté le Madiran public, sa plume et son univers intellectuel, sans avoir l’impression de jamais percer jusqu’à la connaissance de l’homme lui-même, tant il voulut rester discret sur sa vie personnelle. On y retrace les origines d’un jeune homme brillant et original, au caractère très fort, à l’ambition affirmée dès la jeunesse : Jean Arfel est de ces garçons qui n’hésitent pas à prendre la plume avant même leur majorité pour écrire directement ou par organe de presse interposé tout le bien – ou le mal – qu’il pensent des grandes figures intellectuelles de leur temps. Il ira ainsi jusqu’à prendre contact avec Charles Maurras, auteur et politique qui exercera d’abord sur lui une véritable fascination, avant qu’il ne prenne peu à peu ses distances vis à vis du maître et plus encore de ces disciples… La rencontre des deux hommes, à Pau en avril 1943, sera le début d’une longue et respectueuse correspondance. Dans ses jeunes années, Arfel semble déjà déborder d’activité publique : écrivant pour diverses publications politiques (sous divers patronymes), il s’engage sans hésiter et malgré les remous de l’occupation. Sociable et entreprenant, il multiplie les contacts avec des personnalités diverses et noue des amitiés qui dureront, telle celle de Jean Ousset, futur fondateur de la Cité Catholique et de l’Office (aujourd’hui ICTUS).

Maslacq : le tournant

Un premier tournant intervient dans la vie du jeune Arfel lorsqu’il répond à une offre d’emploi parue dans la presse locale : l’école des Roches, institution d’éducation novatrice initialement fondée en Normandie par le pédagogue Edmond Desmolins, temporairement repliée en Béarn, cherchait un professeur de français. Son bref passage à Maslacq (Pyrénées-Atlantique) marquera à jamais la vie du jeune homme. Le contact avec André Charlier, directeur bienveillant mais ferme de l’école, ne sera pas toujours facile, mais Arfel en sortira grandi et mûri. L’univers intellectuel et spirituel de Charlier imprimera profondément sa marque chez Madiran, qui héritera du maître son tropisme bénédictin, son attachement à la liturgie et à la doctrine immuable. Dans le giron de Charlier, notamment à l’occasion des Journées de Maslacq, Arfel rencontrera certaines figures qui compteront beaucoup pour lui par la suite : Henri Charlier, frère d’André, sculpteur, intellectuel et chrétien de premier plan, l’écrivain Henri Pourrat, le dessinateur Albert Gérard… Sur le plan spirituel notamment, c’est à cette époque (1952) qu’une première retraite au prieuré bénédictin de Madiran constitue une première étape importante de son cheminement. Quelques années plus tard, Jean Ousset l’emmènera en retraite dans un foyer de charité, tandis que Marcel Clément le conduira à rencontrer Marthe Robin (1959).

Ces années de formation sont marquées par l’engagement contrasté du jeune Arfel dans le milieu de la presse et de la politique maurassienne. Après avoir collaboré à plusieurs publications de l’univers monarchiste, celui qui se fait à l’époque connaître sous le nom de plume de Jean-Louis Lagor, ou parfois de Jean Castétis, prend ses distances pour jouer sa propre partie et entame ce qui sera le premier et l’un des premiers combats de sa vie : la lutte contre l’influence du communisme jusqu’au sein de l’Église.

Dénonciation de l’influence du communisme

Ils ne savent pas ce qu’ils font, ouvrage publié en 1955, fera connaître Jean Madiran de la presse et de tous les évêques de France. Massivement diffusé grâce au soutien d’un syndicat du patronat, le livre s’en prenait directement à l’orientation marquée d’une certaine frange de la presse catholique, et implicitement à la complaisance de la hiérarchie. Les réactions furent rapidement hostiles et abruptes de la part de l’épiscopat, qui refusa d’entamer un dialogue avec l’auteur. Madiran ira finalement jusqu’à Rome pour se défendre devant le Saint-Office, dans la crainte d’une hypothétique mise à l’Index. On est encore sous le règne de Pie XII et la dénonciation du communisme ne pose pas de problème à Rome, où Madiran profite de l’occasion pour nouer de premiers contacts.

Combat pour le catéchisme

Le second combat n’a pas été initié par lui, mais il s’y ralliera massivement dans les années qui suivront : il s’agit du combat pour le catéchisme. Madiran en sera l’un des principaux acteurs avec la fondation de sa propre revue – Itinéraires, en 1956. Dès les années 1950 s’étaient manifestées de premières velléités de réforme de l’enseignement du catéchisme élémentaire pour s’adapter aux innovations de la pédagogie nouvelle. Certains laïcs s’étaient insurgés contre ces tentatives et avaient formé des mouvements de défense de la catéchèse traditionnelle. Itinéraires rejoint rapidement le combat et sera en première ligne lorsqu’après le Concile l’épiscopat publiera un « Fonds obligatoire » pour l’enseignement du catéchisme, que Madiran qualifiera de « massacre du catéchisme. » La lutte se poursuivra avec le catéchisme hollandais et jusqu’à la publication de Pierres Vivantes, « cadeau empoisonné de l’épiscopat aux enfants de France », casus belli de la « troisième bataille du catéchisme », dans les années 1980.

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