La figure étonnante d’une martyre que l’on représente tenant sa dentition dans une forte tenaille… Qui est sainte Apolline, l’étonnante martyre qui protège les dentistes et leurs patients ?[1]Source de cet article : Les petits Bollandistes, Vies des saints, Paris, Bloud et Barral, 1876, t. 2, pp. 405-406.
Persécution à Alexandrie
En ce milieu de IIIème siècle, à Alexandrie, la persécution contre les Chrétiens était si forte que saint Denys, évêque de la ville, écrivait que ce temps semblait être « celui dont notre Sauveur avait qui qu’à peine les élus s’y pourraient garantir de tomber dans l’erreur et dans les pièges des ennemis. »
Apolline demeurait à Alexandrie, où chacun la regardait comme un modèle de vertu et de modestie chrétienne. Or il y avait en la ville un magicien, ennemi juré de la foi, qui s’efforçait d’animer et de raviver dans le peuple l’esprit du paganisme et des faux dieux. Adorant un seul Seigneur et prêchant un Dieu fait homme crucifié, les Chrétiens ruinaient en effet les superstitions païennes. Les discours de ce sorcier excitèrent les païens avides de violence et de révolte, qui se jetèrent sur les fidèles du Christ, pillèrent et ravagèrent leurs maisons et leurs lieux de culte, massacrant autant de fidèles qu’ils purent en trouver.
Plusieurs croyants furent contraints de quitter le ville et d’abandonner tous leurs biens pour sauver leurs vies et le trésor précieux de la foi. On raconte qu’un seul homme dans toute la cité céda à la violence de la persécution et renia Jésus.
Apolline face aux persécuteurs
Apolline demeura toujours en sa maison, sans crainte de perdre ses biens ni sa vie, joyeuse de trouver peut-être l’occasion de couronner par le martyre la pureté qu’elle avait conservé depuis son enfance et jusqu’en une vieillesse déjà avancée.
S’étant saisis d’elle, les persécuteurs la frappèrent tant au visage et aux joues qu’ils lui brisèrent les mâchoires, puis lui arrachèrent les dents les unes après les autres.
Ils la traînèrent ensuite en un lieu hors de la ville, où un grand brasier avait été allumé, la menaçant de la brûler vive si elle ne renonçait à son Christ. Sur ces paroles, la sage vierge s’arrêta et demanda quelques temps, comme si elle eut voulu délibérer sur ce qu’il lui convenait de faire. Pensant qu’elle reculait devant l’horreur du supplice les païens la laissèrent faire. Profitant de l’occasion, Apolline s’échappa de leurs mains : poussée par l’admirable ardeur qui embrasait son coeur, elle se lança impétueusement dans le feu, à la stupéfaction de tous. Son corps fut aussitôt dévoré par les flammes, élevant vers Dieu un holocauste, sacrifice total et d’agréable odeur. C’était le 9 février de l’an 249.
Un martyre volontaire ?
On pourrait s’étonner de l’action de sainte Apolline, comme celle de certaines femmes qui préféraient se précipiter dans un gouffre ou un fleuve plutôt que de subir les impudiques poursuites des persécuteurs. Doivent-elles être louées ? L’Eglise peut-elle les considérer comme martyres ? Saint Augustin affirme que cet honneur ne doit pas leur être refusé, car ces saintes femmes n’ont pas cédé par là à une démesure où une tentation mais à une impulsion de l’Esprit divin, comme nous le croyons du sacrifice final de Samson.