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« Il nous a tant donné » (1/2)

« Vous trouverez dans ce livre un aperçu de l’âme de Joseph Ratzinger. J’ai tenté de rappeler les moments où, furtivement, il a ouvert le secret de son cœur » (p.9). Voilà tout l’objectif du petit livre du cardinal Robert Sarah (250 pages), publié chez Fayard, au titre évocateur : Il nous a tant donné : Hommage à Benoît XVI[1]Cardinal Robert Sarah, Il nous a tant donné : Hommage à Benoît XVI ; Fayard, Choses vues, 2023..

 

Le propos du livre

Sans avoir la prétention d’écrire une biographie exhaustive, encore moins une synthèse de l’œuvre immense du pape théologien, le cardinal qui fut son ami cherche à montrer la foi de Joseph Ratzinger : cette foi qui déplace les montagnes est la trame de toute la vie de Benoît XVI et permet de saisir la personnalité et le cœur du pape : « là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur » (Mt 6, 21).

L’ouvrage s’articule en trois temps. Après une rapide introduction, on commence par dresser le portrait mystique de Benoît XVI, qu’il résume par l’affirmation capitale : « Dieu est », et ce à travers deux textes inédits. Au cœur de l’ouvrage, le cardinal esquisse les divers visages du pontificat de Benoît XVI, à travers de sept interventions (articles, conférences ou préfaces d’ouvrages) réunies ensemble pour la première fois. Pour finir, le cardinal Sarah s’efface devant la personne du défunt pape, retraçant en dix textes peu connus « un itinéraire en compagnie du pasteur d’âmes qu’il a été et qu’il demeure » (p.10). 

Portrait mystique : « Dieu est ! »

« Plutôt qu’une qualité, plutôt qu’un trait psychologique, le principe architectonique de l’œuvre du pape Benoît est en Dieu – plus exactement, c’est Dieu lui-même, contemplé et aimé » (p. 21). Telle est l’affirmation de départ, le point saillant que propose le cardinal Sarah pour comprendre la personne, la vie et l’œuvre de Benoît XVI : sa certitude confiante en l’existence et la transcendance de Dieu.

« Dieu est vraiment, c’est-à-dire il est actif, il agit, il est capable d’agir et il agir très réellement, maintenant, dans notre monde et dans notre vie » (p .23) écrit-il, citant Ratzinger. Et pour le connaître, il faut passer par son Fils, Jésus-Christ : « c’est à partir de Jésus que l’on peut voir ce que c’est que de vivre totalement de cette assertion : Dieu existe » (p.25). Mgr. Sarah voit en Benoît XVI quelqu’un qui est entré dans le mystère du Fils pour contempler le Père (chap. 1), et a appris de Jésus les vertus de l’enfance spirituelle, la vraie paix du cœur qui mène à cette joie de Dieu dont il rayonnait : « Benoît XVI avait cette liberté joyeuse de l’enfant qui a dit oui une fois pour toutes et sans retour à son Père, et qui devient proche de tout homme » (p. 32). Comment ne pas évoquer alors sa grande œuvre, le triptyque Jésus de Nazareth, témoignage de cette proximité quotidienne avec le Fils de Dieu ?

Par sa contemplation du Fils, Benoît XVI s’est plongé dans Trinité entière, jusqu’à scruter le mystère du Père éternel et comprendre un peu mieux le regard du Père (chap. 2). Convaincu que « la crise de la paternité que nous vivons aujourd’hui constitue le noyau de la crise de l’humain qui nous menace » (p. 39), Benoît XVI propose de penser la paternité non à partir des pères humains, parfois défaillants et injustes, mais à partir de Dieu lui-même ! Être père selon la Bible, d’après le pape, c’est « un amour qui ne cherche pas à prendre possession de l’autre, qui ne l’abandonne pas à son état initial sous prétexte de respecter sa liberté, mais veut la conduire à la vérité la plus intime de son être, qu’il ne peut trouver qu’en son Créateur » (p. 40). C’est pourquoi la toute-puissance divine « s’exprime dans l’amour, la miséricorde, le pardon, l’acceptation de notre liberté et l’infatigable appel à la conversion du cœur » (p.41).

C’est avec cette vision que Joseph Ratzinger fut prêtre pour les âmes, pasteur du troupeau comme évêque, et enfin souverain pontife, « reflet temporel du Père éternel, » (p. 46). Il montra l’exemple d’une paternité forte et douce, prêt à souffrir pour le troupeau de l’Église qu’il voulut mener à la vérité entière, à Dieu lui-même. D’où son attention particulière aux chercheurs de vérité que sont les contemplatifs, son amour pour les prêtres, dons du cœur du Christ aux hommes ; son attention aux enfants, à leurs questions et à la formation des âmes.

Le cardinal de conclure cette première partie : « [Benoît XVI] possédait un regard de père et un sourire d’enfant. Reflet du Père sur cette terre, image du Fils innocent. Il restera le père de nos âmes pour longtemps » (p. 62).

Nous reviendrons dans un prochain article sur les deux autres parties de l’ouvrage : « visages du pontificat » (sept textes de Mgr Sarah pour revenir sur la figure du pape allemand et son œuvre en tant que successeur de Pierre) et un recueil de dix textes pour un itinéraire avec Benoît XVI.

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