Chemin de carême avec Claves.org : vendredi de la Passion
Retirez-vous du ciel, astre des nuits ;
Soleil épouvanté, précipitez votre course ;
Je rappelle les hontes d’une mort barbare,
Le supplice d’un Dieu.
Vierge au cœur fort comme le diamant,
O Mère, vous étiez présente à ce trépas,
Suant d’angoisse, quand votre Fils en croix,
Poussait un grand cri.
Votre Fils, suspendu à la croix sous vos yeux,
Votre Fils, déchiré sous les coups des barbares,
Votre Fils, tout meurtri de blessures béantes,
Ah ! De quelles douleurs il transperce votre âme !
Hélas ! Les crachats, les soufflets, les blessures et les coups,
Les clous, le fiel, le vinaigre, l’éponge et la lance
Les épines, la soif, le sang tour à tour,
Accablèrent votre âme d’angoisse.
Plus vaillante, Ô Marie, que tous les martyrs.
Nouveau prodige, vous demeurez debout,
Mourante en ces douleurs, ô Mère, vous vivez
Enchaînée à vos dures souffrances.
Gloire, honneur, louange à la Trinité sainte !
Daignez, ô Dieu, nous vous prions avec instance,
Daigner donner à tous une force pareille à la force
De Marie, au milieu des épreuves !
Ainsi soit-il.
Selon une ancienne tradition, on célèbre aujourd’hui encore en certains lieux la messe de Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, dont on a donné lecture de l’hymne des vêpres. Et comment mieux nous préparer à la mort de Jésus qu’en nous plaçant dans les dispositions mêmes de sa sainte Mère ?
Et tout d’abord, il faut dire que personne ne peut discerner assez justement la joie et la paix profonde qui ont habité son cœur. Comment décrire cette contemplation de son enfant en la nuit de Noël ? Agenouillée, elle contemple celui qui est son Dieu mais aussi son propre fils ! Comment décrire la sainteté et la simplicité de l’enfance de Jésus à Nazareth ? Personne ne le peut, si bien que ni Jésus, ni sa sainte Mère n’ont voulu en dévoiler les traits à quiconque, ni aux apôtres, ni probablement en quelque révélation privée. Tout cela sans même voir plus avant la félicité intérieure donnée par son âme toute unie à Dieu !
Mais la vie de la sainte Vierge Marie est aussi terriblement touchée par la souffrance, d’autant plus grande en raison de la pureté de tout son être, si étranger à cela. Et la tradition nous rapporte sept événements douloureux dans sa vie ; nombre qui selon la symbolique juive exprime la plénitude. On représente donc parfois le cœur de Marie transpercé par sept glaives, ou plutôt on n’en représente qu’un qui les résument tous.
Méditons quelques instants sur ces sept glaives des douleurs de Notre-Dame.
La première est la prophétie du vieillard Siméon alors que Joseph et Marie présentent l’enfant au Temple : « vous-même, un glaive transpercera votre âme. »Quelle joie devait avoir Marie de présenter son si bel enfant ! Le plus beau de tous les enfants des hommes… La terrible prophétie tombe pourtant avec toutes les promesses d’accomplissement. Marie le sent, elle le sait mais elle a déjà accepté ce plan divin pour le rachat de l’homme.
La fuite en Égypte, alors qu’« Hérode cherche l’enfant pour le faire mourir » et la disparition de l’Enfant-Jésus pendant trois jours à Jérusalem la prépareront durement au séjour au tombeau de son Fils.
Mais « l’heure est proche, l’heure où le fils de l’homme sera livré aux pécheurs » et Marie le rencontre déjà sur le chemin de la Croix. Il n’est plus vraiment beau, cet homme de douleur. Peut-être peine-t-elle à distinguer en son visage les propres traits qu’elle lui avait donnés. Sa Mère le regarde et elle recueille cette douleur. Son fils la regarde et trouve un peu de réconfort dans cette âme qui lui est si attachée. « Vierge très fidèle » comme l’appellent les litanies, elle reste debout au pied de la Croix, unie d’un seul cœur avec celui de son Fils.
Et tant de souffrances vont s’achever : elle reçoit le corps de son Fils. Elle contemple la chair de sa chair, abîmée par la jalousie et l’orgueil des hommes.
Épuisée de douleurs, elle le laisse reposer au tombeau avec au cœur néanmoins une secrète espérance.
Y a-t-il une douleur plus grande pour une mère que celle de perdre son Fils ? Celle-là les résume toutes et nous n’y sommes pas étrangers. Un chant traditionnel corse nous fait poser cette question : O Marie, qui a planté dans votre cœur les sept glaives ? O Marie, qui a tué et massacré votre beau fils ? C’est moi l’ingrat, O Marie, pardon et miséricorde !
Où en sommes-nous dans la prière du Rosaire ou du chapelet ? Arrivons-nous à le dire en entier, en partie ? Puis-je faire davantage aujourd’hui et les jours prochains ? Si je le dis déjà en entier, faire attention à la vitesse à laquelle je le dis. Si l’union du cœur est avant tout recherché, ma prière est-elle une belle salutation et une consolation pour le Cœur Immaculé de Marie ?