“Vous n’imprimerez pas de figure sur vous” (Lv 19, 28) : ce commandement du Lévitique est parfois traduit plus abruptement : “vous ne vous ferez pas de tatouage.” La Bible et l’Eglise réprouvent-elles totalement le tatouage ?
Une lecture catholique de la Bible implique de prendre en compte le contexte et l’esprit d’un verset, qui ne peut être isolé et lu en dehors de l’ensemble de la parole divine. Ce commandement se trouve dans le “Code de sainteté” du Lévitique, grand ensemble de prescriptions rituelles en lesquelles Dieu, par l’intermédiaire de Moïse, pose le cadre dans lequel Israël devra vivre comme un peuple sacerdotal, consacré en particulier au milieu des nations. Lv 19, 28 se trouve au milieu de préceptes réprouvant diverses pratiques idolâtres ou syncrétistes, susceptibles d’induire une mélange entre la religion du vrai Dieu et les cultes des peuples voisins : divination, magie, prostitution sacrée… Ainsi l’interdiction du tatouage semble faire elle aussi référence à une pratique religieuse – c’est l’interprétation générale des auteurs catholiques. Ce que la Bible réprouve, c’est le tatouage comme rituel religieux ou expression de superstition.
Le tatouage est-il dès lors permis, voire encouragé par l’Eglise ? La récente en Occident, où elle se répand rapidement et n’a ainsi jamais fait l’objet d’une réelle prise de position ecclésiastique. On ne peut pas dire non plus qu’elle y soit représentative d’une tradition. En Orient en revanche, certains peuples comme les Coptes ont depuis des siècles déjà la coutume de se faire imprimer une croix relativement discrète sur la peau (généralement de l’avant-bras), afin de marquer leur appartenance à la minorité chrétienne souvent brimée et soumise au statut de “dhimmitude.”
Le tatouage, expression et témoignage de foi dans un monde sécularisé ? C’est ce que certains soutiennent aujourd’hui. On peut toutefois émettre deux réserves, appuyées notamment la pratique de l’Eglise qui interdit toute mutilation corporelle (Catéchisme de l’Eglise Catholique, n°2297 sur le respect de l’intégrité corporelle ; Code de Droit Canonique 1041 qui interdit l’accès aux ordres sacrés à toute personne s’étant mutilé). Le tatouage, induisant dans le corps de manière volontaire une marque indélébile, respecte-t-il cet élément inaliénable de la personnalité humaine, don de Dieu et instrument de sanctification ? Cette pratique peut-elle par ailleurs être totalement séparée de toute signification religieuse ou superstitieuse ? Les motifs les plus souvent représentés sur les images tatouées doivent inciter à se poser cette question en toute honnêteté.