Chemin de Carême avec Claves.org : vendredi des Quatre-Temps de carême
« Après cela, il y eut une fête des Juifs et Jésus monta à Jérusalem. Or il existe à Jérusalem, près de la Probatique, une piscine qui s’appelle en hébreu Bethesda et qui a cinq portiques. Sous ces portiques gisaient une multitude d’infirmes, aveugles, boiteux, impotents, qui attendaient le bouillonnement de l’eau. Car l’ange du Seigneur descendait par moments dans la piscine et agitait l’eau : le premier alors à y entrer, après que l’eau avait été agitée, se trouvait guéri, quel que fût son mal. Il y avait là un homme qui était infirme depuis 38 ans. Jésus, le voyant étendu et apprenant qu’il était dans cet état depuis longtemps déjà, lui dit : “Veux-tu guérir ?” L’infirme lui répondit : “Seigneur, je n’ai personne pour me jeter dans la piscine, quand l’eau vient à être agitée ; et, le temps que j’y aille, un autre descend avant moi.” Jésus lui dit : “Lève-toi, prends ton grabat et marche.” Et aussitôt l’homme fut guéri ; […] Après cela, Jésus le rencontre dans le Temple et lui dit : “Te voilà guéri ; ne pèche plus, de peur qu’il ne t’arrive pire encore.” » (Jn 5, 1-15)
La fête dont il est parlé au début du récit est la fête de Purim, qui a lieu en mars. Elle rappelle le sauvetage des Hébreux en exil par la reine Esther. Cette fête était célébrée chez les juifs par des œuvres de bienfaisance et des présents mutuels : c’était le jour des largesses. Jésus rentre dans l’esprit de cette fête quand, par sa compassion, éveillée à la vue de cet homme gisant et abandonné, par la contemplation intérieure de la vie de souffrances qui avait précédé ce moment, il use de largesse et accomplit envers lui une œuvre de miséricorde. Sa question : « veux-tu guérir ? » est une promesse implicite. Cette question ne veut pas tant dire « Désires-tu être guéri ? » que « Es-tu décidé à guérir ? ». En effet, ce n’est pas le désir qui manque, mais la conviction d’être exaucé. Sa foi a besoin d’être stimulée. En l’interrogeant ainsi, non seulement Jésus tire le malade du sombre découragement où l’avait plongé cette longue attente, et ranime en lui l’espérance ; mais surtout il détourne sa pensée du mauvais moyen de guérison auquel il ne pensait plus qu’exclusivement, pour la tourner vers Lui, l’unique source de toute vie. Cette situation est semblable à celle que rencontrèrent Pierre et Jean dans les Actes des Apôtres : « Or on apportait un impotent de naissance qu’on déposait tous les jours à la porte du Temple appelée la Belle, pour demander l’aumône à ceux qui y entraient. Voyant Pierre et Jean sur le point de pénétrer dans le Temple, il leur demanda l’aumône. Alors Pierre fixa les yeux sur lui, ainsi que Jean, et dit : “Regarde-nous.” » (Ac 3, 2-4). Ces deux épisodes montrent l’incapacité de la loi ancienne à guérir en profondeur l’homme déchu et de lui redonner la vie. Ces deux malades doivent regarder ailleurs, chercher plus haut leur moyen de salut. Seul le Christ est « le chemin, la vérité, la vie », et par délégation, ses disciples et leurs successeurs : « qui vous écoute, m’écoute, qui vous rejette me rejette » (Lc 10, 16).
Nous aussi, nous avons tendance à attendre notre bonheur et notre salut d’autres sources que du Christ. Il suffit de regarder l’explosion des ventes de livres d’autoréalisation, de développement personnel, de yoga, de PNL , de relaxation et autres méthodes en tout genre d’épanouissement personnel. « Depuis le Covid, le thème du développement personnel fait un carton en librairie. Avec, déjà, le risque de saturation du marché, » écrivait l’Express en juillet 2022. Une saturation qui nous rappelle les nombreux malades végétant autour de la piscine de Bethesda, jouant des coudes pour accéder à l’eau frémissante ! L’évangile du jour nous invite à détourner nos regards de ces fausses sources d’épanouissement qui ne peuvent, ni nous procurer le bonheur, ni nous donner le salut, car non fondées sur la personne du Christ. Il ne peut y avoir de réel bonheur sans Dieu.
En revanche, l’avertissement que Jésus adresse au malade, nous révèle la première source de nos malheurs : le péché. Si on ne peut en conclure de la réponse de Jésus à la question des disciples que la maladie résulte forcément du péché individuel : « Ni lui ni ses parents n’ont péché, mais c’est afin que soient manifestées en lui les œuvres de Dieu. » (Jn 9, 3), elle a le mérite de nous rappeler que le péché est pire que trente-huit années de souffrances physiques !
Nous voilà donc invités à prendre conscience de la gravité du péché et des véritables moyens d’être heureux sur terre et d’obtenir la vie éternelle : tourner notre regard vers Jésus, aller puiser à la source des sacrements et de l’enseignement de l’Église.
Comme résolution du jour, je vous propose d’aller à la piscine municipale et de faire une dizaine de longueurs en esprit de pénitence ! Plus sérieusement, nous pourrions peut-être, à l’image de la fête juive de Purim, faire des actes généreux, notamment envers les personnes souffrant de maladies graves. Une visite, un appel, un don, une prière que sais-je. Laissez-vous inspirer par l’Esprit-Saint !