Chemin de carême avec Claves.org : vendredi de la quatrième semaine de carême.
Comme hier, l’Église nous offre aujourd’hui encore le récit de deux résurrections : c’est l’annonce de la pâque prochaine, et en même temps un encouragement à l’espérance pour tous les morts spirituels qui demandent à revivre.
Avant d’entrer dans les deux semaines consacrées aux douleurs du Christ, l’Église rassure ses enfants sur le pardon qui les attend, en leur offrant le spectacle consolant des miséricordes de Jésus. Son sang va nous réconcilier ! Attardons-nous encore à admirer sa bonté et sa miséricorde. Ainsi, nous serons délivrés de toutes nos craintes. Non, nous ne nous laisserons pas aller à l’accablement ou au désespoir lorsque sera venu le moment de méditer sur toutes ces cruautés que nos péchés ont causé. Bien plutôt, nous compatirons à ses douleurs avec un cœur simple.
Écoutons la lecture tirée du livre des Rois : « En ces jours-là, le fils d’une mère de famille devint malade et sa maladie fut si violente qu’il ne resta plus en lui de respiration. Cette femme dit donc à Élie : Qu’y a-t-il de commun entre vous et moi, homme de Dieu ? Êtes-vous venu chez moi pour renouveler la mémoire de mes péchés, et pour faire mourir mon fils ? Élie lui dit : Donnez-moi votre fils. Et l’ayant pris d’entre ses bras, il le porta dans la chambre où il demeurait, et il le mit sur son lit. Il cria ensuite au Seigneur ; et il lui dit : Seigneur mon Dieu, avez-vous aussi affligé cette veuve, qui a soin de me nourrir comme elle peut, jusqu’à faire mourir son fils ? Après cela il s’étendit sur l’enfant par trois fois, en se mesurant à son petit corps, et il cria au Seigneur et lui dit : Seigneur mon Dieu, faites je vous prie, que l’âme de cet enfant rentre dans son corps. Et le Seigneur exauça la voix d’Elie ; l’âme de l’enfant rentra en lui, et il recouvra la vie. » (1R 17, 17-24)
Dans l’évangile, c’est le récit de la résurrection de Lazare qui nous est offert. L’évangéliste saint Jean a cette précision bouleversante : en voyant Marie Madeleine, la sœur du défunt, en pleurs, Jésus « frémit en son esprit, et se laissa aller à l’émotion. […] Et Jésus pleura. Les Juifs dirent : “Voyez comme il l’aimait.”» (Jn 11, 1-45)
Les deux femmes que la liturgie met en avant aujourd’hui sont des exemples de pénitence : la veuve de Sarepta ne semblait pas avoir besoin qu’Elie renouvelle la mémoire de ses péchés. « Mon péché est toujours devant moi » aurait-elle pu dire à la suite du psalmiste. Quant à Marie-Madeleine, nous savons dans quel esprit de pénitence elle vécut après sa rencontre avec Jésus.
Au-delà de ces figures féminines, les antiennes de la messe invitent à nous laisser généreusement aller à la componction – la tristesse d’avoir offensé Dieu par nos fautes. Ne perdons pas de vue que le renoncement le plus essentiel est le renoncement au péché. Dom Marmion établit cette doctrine en des termes nets. Ecoutons-le dans une lettre écrite à une de ses Philotée :
« Vous devez être persuadée que votre passé de péché n’est pas du tout un obstacle à une union très intime avec Dieu. Dieu pardonne, et son pardon est divin. Avec les anges, Dieu n’a pas été miséricordieux, parce qu’ils n’ont pas de misères. Avec nous, qui sommes remplis de misères, Dieu est infiniment miséricordieux.
Ce qui vous manque, ce qui laisse à votre vie spirituelle un peu de légèreté, de défaut d’équilibre et de stabilité, c’est que vous n’avez pas assez pratiqué la vertu de pénitence. La confession remet tous les péchés, mais il reste dans l’âme comme des cicatrices du péché, qu’une habitude contraire doit faire disparaître : la vertu de componction.
Je désire donc beaucoup que, durant quelques années, vous vous adonniez à la vertu de pénitence. Vous ne devez pas pour cela vous souvenir en détail de votre vie passée, mais vous rappeler que vous avez offensé Dieu et le regretter constamment. La vertu de pénitence se manifestera en vous par ces trois choses :
I. L’esprit de componction. Je désire beaucoup que vous vous entreteniez toujours dans cet esprit. Dites souvent : “Mon Dieu, ayez pitié de moi qui suis un pécheur” (Lc 18,13.). Par cette prière, on ne dit rien, on montre seulement sa misère à Dieu ; on sent qu’on n’est qu’un pauvre pécheur devant lui. Il ne faut certes pas vous bander l’esprit, vous interdire tout acte de louange, d’actions de grâces, mais il faut que la componction domine. Faites souvent le chemin de la croix ; commencez toujours votre oraison en vous jetant comme une pécheresse aux pieds de Dieu. Je suis sûr que si vous vous plongez ainsi dans la componction pendant quelques années, jusqu’à ce que le Bon Dieu vous appelle à un autre sentiment, vous en retirerez un immense bien pour votre âme. Si vous avez tardé à vous donner à Notre-Seigneur, eh bien ! réparez cela en vous donnant maintenant à Lui sans réserve avec une grande fidélité et une grande générosité. Et ne craignez jamais que vos fautes et vos infidélités passées vous empêchent d’arriver au degré d’union que Dieu veut pour vous en un instant, il peut réparer tout cela.
2. La mortification. Pour vous, elle consistera surtout dans les mortifications de la vie commune acceptées généreusement.
3. L’amour. Vous devez aimer beaucoup; vous avez un cœur aimant, capable de beaucoup aimer. Il faut réparer le passé par un grand amour de Notre- Seigneur. Il faut aimer dans le sens de Marie-Madeleine aux pieds de Jésus. “Beaucoup de péchés lui ont été remis, parce qu’elle a beaucoup aimé.” Dites souvent à Notre-Seigneur : “Mon Dieu, je veux vous aimer beaucoup plus que je ne vous ai offensé dans le passé.” »