Chemin de carême avec Claves.org : samedi de la deuxième semaine de carême
“Je me lèverai, et j’irai vers mon père, et je lui dirai : Mon père, j’ai péché contre le Ciel et contre toi ; je ne suis plus digne désormais d’être appelé ton fils, traite-moi comme l’un de tes mercenaires. Et se levant, il vint vers son père. Comme il était encore loin, son père le vit, et fut ému de compassion ; et, accourant, il se jeta à son cou, et le baisa. Et le fils lui dit : Mon père, j’ai péché contre le ciel et contre toi ; je ne suis plus digne d’être appelé ton fils. Alors le père dit à ses serviteurs : Vite, apportez la plus belle robe, et revêtez-l’en ; et mettez un anneau à sa main, et des chaussures à ses pieds ; puis amenez le veau gras et tuez-le ; et mangeons, et faisons bonne chère ; car mon fils que voici était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé. [le fils aîné, revenant des champs, désapprouve ce traitement, bien plus agréable que celui qui reçoit quotidiennement.] Alors le père lui dit : Mon fils, tu es toujours avec moi, et tout ce que j’ai est à toi : mais II fallait faire bonne chère et se réjouir, parce que ton frère que voici était mort, et qu’il est revenu à la vie parce qu’il était perdu, et qu’il est retrouvé.” (Lc 15, 11-32)
Cet évangile est passionnant : tout le monde le connait, il est illustré par les plus grands peintres, il est pour les enfants l’une des meilleures explications du sacrement de confession. En même temps, il n’apparait que dans l’Évangile de saint Luc, et même, il est employé dans la liturgie uniquement ce samedi de la 2° semaine de carême ! Cette curiosité signale qu’écouter l’évangile du dimanche ne suffit pas à connaitre l’Évangile. Il faudra bien, si vous ne l’avez pas encore fait, lire les quatre récits des évangélistes, puis, prolonger avec les actes des apôtres, hautement stimulants pour notre vie quotidienne, sans oublier les épîtres, si nourrissantes. Ceci dit, revenons au chapitre de ce jour.
Pour les premiers auditeurs de la parabole, il y avait des réminiscences, très claires, de l’Ancien Testament : le retour du fils chez son père fait penser au retour du peuple hébreu en Israël , les vêtements de fête sont dans plusieurs passages le signe de la faute pardonnée , le repas de fête jalousé peut faire penser à la dispute entre Esaü et Jacob, après que le second ait trompé le premier, usant d’un repas, pour recevoir la bénédiction paternelle ; la conclusion : « mon fils, tu es toujours avec moi » renvoie au psaume 73.
Pour les hommes de l’Ancien Testament, cette parabole était donc une illustration de la bonté divine, du choix divin envers eux. Pour nous, la parabole est celle de la miséricorde et de la plus grande miséricorde possible que Dieu nous a donnée, le pardon certain des péchés dans le sacrement de confession. Une étape majeure dans l’histoire du salut est ainsi franchie, permettant d’être délivrés des angoisses de la damnation, ou de la certitude présomptueuse qui nous fait croire être sauvés par nos seules actions, la grâce n’étant qu’un coup de main de Dieu, et non ce qu’elle est réellement, notre souffle vital, sans lequel nos actions sont mortes, car alors privées de la charité.
Prenons un peu de temps encore et voyons la figure du fils aîné : visiblement, il n’est pas des plus aimables, ni des plus miséricordieux. Mais en toute honnêteté, n’aurions-nous pas la même réaction ? – Ce qui est certain, c’est que cette réaction est condamnable. Elle n’est pas seulement un peu sèche, ou trop dure, elle est mauvaise. Voici deux indices : d’abord, parlant de son frère, l’aîné dit « ton fils que voici ». Nous connaissons cela. « Ta mère a décidé », « ton père veut que »… Manière de s’exclure de la décision, de rompre l’unité. Dans cet évangile, le frère renie son frère, sous le coup de l’injustice qu’il pense subir. Ensuite, il ne semble pas conscient de l’affection que son père a pour lui, il ne perçoit le lien qui les unit qu’en terme de devoirs et d’obéissance, sans noter – et donc probablement sans vivre pleinement – l’amour qui les unit.
Ce fils aîné est une figure représentant la plupart d’entre nous. Nous voyons l’obéissance que nous devons à la loi divine, mais voyons-nous l’amour que notre Seigneur nous prodigue sans cesse ? Sur quoi portons-nous d’abord nos pensées ? Nos difficultés viennent principalement de là : nous aimons Dieu, nous suivons Dieu, nous proclamons notre Dieu, sans suffisamment vivre selon les exigences de sa loi d’amour. Il n’est pas dit si le fils aîné va finalement rejoindre son frère et son père, où s’il reste dehors, s’il accepte la grâce ou non. Nous, que choisissons-nous ? L’épître aux Galates dit en tout cas avec force : « toute la Loi est accomplie dans cette seule parole, tu aimeras ton prochain comme toi-même. »
Pour mon progrès :
Luttez contre la tentation du fils aîné. Pensez à une injustice apparente qui peut habiter votre cœur, comme une jalousie, des retrouvailles que vous n’osez pas engager, ou même un retard dans la manifestation d’une amitié. Tâchez de corriger cela, si possible, par une lettre, un mail, un coup de téléphone, un texto. Pour l’amour de Dieu et de son prochain.