Références
↑1 | Bible de E. Osty, p. 2182, note sur Mc 14, 32-42 ; cf. également A. Feuillet, L’Agonie de Gethsémani, Paris, Gabalda, 1977, p. 265 et suivantes. |
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↑2 | Le mot « agonie » n’est utilisé que dans la version que saint Luc fait de cet épisode. |
↑3 | Référence libre à l’épisode de la résurrection de Lazare : Jésus, voyant Marie pleurer la mort de son frère, « frémit en son esprit et s’émut soi-même – turbavit se ipsum » (Jn 11, 33). Pascal met ici le doigt, dès le début de son texte, sur ce qui fait le mystère de l’Agonie de Jésus ; Jésus n’est pas « submergé » par ses passions, il en maîtrise le moindre mouvement, et s’il vit ce moment tragique, mystérieux, c’est parce qu’il l’a voulu : il se trouble lui-même, il choisit d’éprouver ce trouble, pour partager avec nous l’obscurité, afin de poser à notre place un acte d’abandonnement à la volonté de son Père. |
↑4 | Cf. Ps 69, 21 : « L’opprobre a brisé mon cœur et je suis malade ; j’attends de la pitié, mais en vain ; des consolateurs, et je n’en trouve aucun. » |
↑5 | Traduction libre de la demande du Christ aux trois apôtres en Mt 26, 38 : « Sustine hic et vigilate », qui se traduit plutôt par : « demeurez ici et veillez ». |
↑6 | Seul saint Jean – qui ne décrit pas la scène de l’Agonie – nous rapporte que l’arrestation de Jésus eut lieu dans un jardin : Jn 18, 1. |
↑7 | Le rapprochement entre les deux jardins (celui d’Éden et celui de Gethsémani) est éloquent : dans le jardin des douleurs, le nouvel Adam porte et rachète le premier péché, celui du premier Adam au jardin des délices. Cf. 1 Co 15, 20-22 ; Rm 5, 18-19 : « Ainsi donc, comme par une seule offense la condamnation a atteint tous les hommes, de même par un seul acte de justice la justification qui donne la vie s’étend à tous les hommes. Car, comme par la désobéissance d’un seul homme beaucoup ont été rendus pécheurs, de même par l’obéissance d’un seul beaucoup seront rendus justes. » |
↑8 | Voici la double explication que donne A. Feuillet de ce célèbre passage : « 1° bien que l’agonie de Jésus soit un fait du passé, localisé dans le temps comme dans l’espace, elle n’en est pas moins, par sa portée, coextensive à l’histoire entière de l’humanité : Jésus a souffert et est mort pour les péchés de tous les hommes de tous les temps ; 2° bien que Jésus soit l’unique Sauveur, il n’en prolonge pas moins son agonie en ses disciples, ainsi qu’en font foi tant d’expériences religieuses, à commencer par celle de saint Paul » (A Feuillet, L’agonie de Jésus, cit., p. 280). |
↑9 | Pascal donne ici deux raisons pour expliquer l’Agonie. La plus classique, c’est la peur de la mort ; si cette explication est possible, ce n’est certainement pas la seule ni la principale, le Christ sachant pertinemment ce qui devait arriver depuis longtemps. L’autre raison étonne : celle de l’incertitude de la volonté du Père : car le Christ, en vérité, connaît la volonté du Père ; il faut donc, avec le C. Journet, au moins nuancer cette affirmation de Pascal (C. Journet, Vérité de Pascal, p. 213). Mais il ne faut pas pour autant négliger la profondeur et la vérité de l’Agonie : le Christ s’est troublé lui-même, acceptant une certaine obscurité, sorte d’anti-transfiguration, pour partager avec nous la nuit, pour expérimenter l’abandon (même si, bien sûr, le Père ne l’a jamais abandonné) afin d’y répondre par son propre abandon à la Volonté du Père (non pas ma volonté…) et triompher ainsi du mystère d’iniquité. Avec toute la prudence possible (non, Jésus n’est pas abandonné par le Père ; Jésus est le bien aimé du Père ; Jésus a la vision béatifique, même sur la Croix), nous pouvons dire, avec A. Feuillet (p. 198) : « il semble qu’au cours de sa Passion, tout d’abord à Gethsémani, et peut-être plus encore au Calvaire, Jésus, pour expier les fautes de l’humanité, ait volontairement expérimenté dans son humanité la détresse et la solitude des hommes séparés de Dieu par leurs péchés. » Ainsi, l’Agonie est aussi une révélation de l’horreur du péché, qui est séparation d’avec Dieu. Jésus, volontairement, se trouble lui-même en son humanité, n’use pas de cette science qui lui permet de saisir la présence de Dieu qui l’habite, et « a librement éprouvé les conséquences horribles du péché : pour un moment, s’en est trouvée obscurcie la conscience de sa communion avec le Père ; aussi n’apportait-elle plus à son âme humaine aucune consolation ». (p. 199) |
↑10 | « Allons » (Mt 26, 46) : on perçoit comme le Christ semble s’encourager lui-même, après son agonie. |
↑11 | « Il avança » (Jn 18, 4) |
↑12 | Correspond à la description de l’agonie selon saint Matthieu (Mt 26). |
↑13 | Mt 26, 50 : « Mon ami, ce que tu es venu faire, fait-le », dit le Christ à Judas lorsqu’il l’embrasse pour le trahir. |
↑14 | Magnifique et fidèle traduction de Lc 22, 41 : arrivé au jardin des Oliviers, « Jésus s’arrache d’avec ses disciples » (avulsus est; généralement traduit par « il s’éloigna »). Ici, apparaît combien Jésus a besoin, en cette nuit douloureuse, de ses amis, et combien le fait de l’éloigner d’eux lui est pénible. |
↑15 | A partir d’ici commence un dialogue entre le Christ et Pascal (indiqué par les “” pour les paroles du Christ), qui se terminera au v. 48 avec une phrase similaire à celle du v. 22, signe de la cohérence de tout ce qui va suivre. On a souvent rapproché cette phrase d’un texte de Saint Bernard, De diligendo Deo, PL 182, 987 : « Tu es bon, Seigneur, pour l’âme qui te cherche : que dire donc de celle qui te trouve ? Mais voici quelque chose d’admirable : personne ne peut te chercher, s’il ne t’a pas au préalable trouvé ! Tu veux donc être trouvé pour être cherché et être cherché pour être trouvé. Tu veux certes être cherché et être trouvé, mais non pas devancé ». A. Feuillet propose (p. 281), un rapprochement avec saint Augustin, De gratia et libero arbitrio, 17, 38 : « Nous n’aimerions pas Dieu si lui-même ne nous avait pas aimé le premier », et avec Sg 6, 12-14 : « La Sagesse se laisse trouver par ceux qui la cherchent. Elle prévient ceux qui la désirent en se faisant connaître la première. Qui se lève tôt pour la chercher n’aura pas à peiner : il la trouvera assise à sa porte ». C’est le mystère de la grâce qui est ici soulevé : Dieu prévient nos désirs, il est la cause de notre repentir et de nos retours à Lui. |
↑16 | Référence à la sueur de sang que Jésus verse pendant l’agonie, en Lc 22, 44 |
↑17 | Sans doute, d’après Feuillet, p. 282 : comme si c’était moi qui priait : car en réalité, « c’est Jésus qui prie en Pascal, et, d’autre part, Jésus a fait de la conversion de Pascal son affaire personnelle » ; ou bien, et c’est tout aussi juste, Pascal prie pour Jésus, en ce sens que, membre du Corps Mystique, il « prolonge » par sa prière la prière de Jésus. |
↑18 | Magnifique représentation de l’Église, dans laquelle Jésus, pourtant vivant et glorieux au Ciel, meurt « dans ses élus et au Saint-Sacrement » ; paradoxe étonnant qui peut se comprendre en trois sens (Feuillet, p. 283) : 1°) Au Ciel, le Christ glorieux demeure dans un état permanent d’offrande, il est l’Agneau debout, glorifié et pourtant égorgé (Ap 5, 6) ; sur terre, Jésus meurt à travers ses saints martyrs qui continuent de donner leur vie ; enfin, le saint Sacrifice de la Messe réactualise la Passion du Christ : Jésus, dans l’hostie, est bien glorieux, mais il s’offre pourtant également en sacrifice. Il faut supporter le paradoxe mystérieux d’un Christ glorieux mais victime (hostia), sans en atténuer la portée. |
↑19 | Passage difficile à traduire. Certains proposent : « comme [l’animal, ou l’homme] immonde aime sa fange ». Pour d’autres, immundus se rapporte au Christ, luto à l’homme : on aurait donc « Je suis devenu comme un être souillé, pour te sauver, toi qui n’est que boue ». La référence de ce passage étonnant est probablement Is 64, 6-8. |
↑20 | 2 Co 5, 21 : « celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a fait péché pour nous ». |
↑21 | Référence explicite aux versets d’Isaïe 53, 3-5, qui évoque « le châtiment » qui tombe sur le Serviteur souffrant, et ces « plaies » grâces auxquelles nous sommes « guéris ». (cf. la mention des plaies chez Pascal, au v. 40). |
↑22 | « Vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal ». |
↑23 | Pascal pense sans doute au paradoxe de la Résurrection : alors que Jésus interdit à Marie-Madeleine de le toucher (Jn 20, 17), il ordonne à Thomas de mettre sa main dans son côté quelques versets plus loin (Jn 20, 27). Le fond de l’explication est sans doute dans une méditation sur la foi : croire sans voir. Jésus encourage Marie-Madeleine à croire en lui, sans signe ni contact, car telle est la nature de la foi théologale, qui ne s’appuie pas sur les signes mais sur le témoignage de Dieu se révélant ; tandis que Jésus soutient Thomas dans son manque de foi en lui accordant gracieusement un signe, tout en l’encourageant à dépasser cela à l’avenir : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu ». |