Une série américaine produite par une équipe protestante et financée uniquement par des dons fait parler d’elle depuis déjà plusieurs années dans le monde anglophone ; elle est arrivée en France depuis quelques mois et suscite un certain engouement parmi les catholiques. Faut-il se lancer dans The Chosen ?
Cliquer ici pour voir les épisodes de la série The Chosen – sous-titres français disponibles.
Le phénomène qui fait parler de lui outre-Atlantique depuis plusieurs mois est enfin arrivé en France : grâce à C8 les huit épisodes de la première saison de la série The Chosen sont enfin doublés et disponibles en français. L’initiative est novatrice à plusieurs titres : c’est la première fois que l’on produit un ensemble de plusieurs saisons sur la vie du Christ et c’est le premier feuilleton entièrement financé par des dons, au fur et à mesure de sa production, en outre la manière d’approcher le personnage du Christ et sa vie est particulièrement innovante.
Comment traduire le titre ? En anglais le mot « chosen » entretient l’ambiguïté en n’indiquant pas son nombre : s’agit-il d’un élu (Jésus) ou des élus (les apôtres et disciples) ? Le parti pris du scénario semble en effet être de faire découvrir Jésus à travers les yeux de plusieurs de ses contemporains, surtout ceux qu’il a choisis pour le suivre.
En gardant à l’esprit le fait que l’initiative de production émane de milieux protestants, qui affirment cependant avoir pris avis de prêtres catholiques, on peut relever ici brièvement quelques critiques, points forts et faibles de la série, à plusieurs niveaux. On abordera plus à fond dans deux prochains articles la production sous un angle chrétien, puis la question théologique fondamentale qu’elle a le mérite de soulever.
Une série à regarder
Les raisons de regarder The Chosen sont nombreuses. Sans se placer d’abord du point de vue du théologien, ou même du chrétien, il faut reconnaître une réelle qualité de réalisation : les plans sont beaux, la méthode de prise de vue est moderne et très agréable – un cinéphile contemporain ne sera pas rebuté par les images des différentes scènes évangéliques représentées. Du point de vue de la mise en scène historique, il faut là encore saluer le travail approfondi effectué pour reconstituer un cadre fidèle. Les paysages de l’Utah se prêtent étonnamment bien à la reconstitution du contexte palestinien, l’ambiance des villes et villages est authentiquement moyen-orientale, colorée et animée à souhait. En règle générale il faut souligner la beauté d’ensemble des plans et des images, des lumières, des personnages. Une réelle beauté qui entre en pleine harmonie avec le récit évangélique et la personne de Jésus que l’on y découvre peu à peu.
Scénario original et bien maîtrisé
La mise en scène ne se départit pas d’un certain humour : pour ceux qui regardent la version originale, les accents orientaux pris par les acteurs introduisent un décalage ironique discret (gommé dans la version française) ; certaines scènes sont des références facétieuses aux chefs d’œuvre du cinéma – la rencontre entre les premiers apôtres et Philippe renvoie aux grandes heures du western (Saison 2, Episode 2), le générique rappellera de bons souvenirs aux amateurs de l’agent 007… Les allusions sont même politiques : contrôle militaire au « checkpoint » commandant l’entrée de Jérusalem, avec interrogatoire et fouille au corps à la recherche de potentiels terroristes – quiconque a traversé le mur séparant Israël de la Palestine aujourd’hui s’y retrouve sans peine. Du point de vue du scénario enfin, les codes du genre sont maîtrisés : les épisodes sont bien rythmés, la chute annonçant la suite aiguise la curiosité. Certains épisodes de la deuxième saison nous ont cependant semblé moins denses, avec quelques longueurs, après l’intensité des scènes représentées dans la première (pêche miraculeuse, noces de Cana, guérison du paralytique, rencontres avec Nicodème et la Samaritaine). Les critiques les plus exigeants reprocheront peut-être aussi une certaine lourdeur de réalisation – « à l’américaine » – marquée par des thèmes musicaux insistants, des ficelles de mise en scène un peu grosses destinées à renforcer les effets d’attente… Pas de quoi gâcher – nous semble-t-il – le plaisir du spectateur.