Chemin de carême avec Claves.org : Mercredi des Cendres
“En ce temps-là, Jésus dit à ses disciples : lorsque vous jeûnez, ne prenez pas un air sombre, comme les hypocrites, qui atténuent leur visage, pour faire paraître aux hommes qu’ils jeûnent ; en vérité, je vous le dis, ils ont reçu leur récompense. Pour toi, quand tu jeûnes, parfume ta tête et lave ton visage, afin qu’il ne paraisse pas aux hommes que tu jeûnes, mais à ton Père qui est présent dans le secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. Ne vous amassez pas des trésors sur la terre, où les voleurs percent les murs et dérobent. Mais amassez-vous des trésors dans le ciel, où ni la teigne ni les vers ne consument, et où les voleurs ne percent pas les murs ni ne dérobent. Car là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur.” (Mt 6, 16-21)
L’évangile de ce premier jour de Carême insiste de façon toute particulière sur l’apparence à prendre, ou plutôt l’apparence à ne pas prendre, pour vivre ce Carême comme un véritable disciple de Jésus-Christ. De là à penser que le Christ voudrait nous donner un cours de maintien, il n’y aurait qu’un pas.
En réalité, c’est une invitation pressante à l’intimité divine que nous formule l’Église pour ce premier jour de Carême.
Laissez-moi vous rappeler ce passage tiré du Livre de l’Exode, où Moïse redescend du Mont Sinaï avec en mains les nouvelles tables de la Loi :
“Moïse ne savait pas que la peau de son visage rayonnait parce qu’il avait parlé avec le Seigneur. Aaron et tous les Israélites regardèrent Moïse et virent que la peau de son visage rayonnait. Ils eurent alors peur de s’approcher de lui. Moïse les appela. Aaron et tous les chefs de l’assemblée vinrent vers lui et il leur parla. Après cela, tous les Israélites s’approchèrent et il leur donna tous les ordres qu’il avait reçus du Seigneur sur le mont Sinaï. Lorsque Moïse eut fini de leur parler, il mit un voile sur son visage. Quand Moïse entrait dans la présence du Seigneur pour parler avec lui, il retirait le voile jusqu’au moment où il ressortait. Et quand il sortait, il transmettait aux Israélites les commandements qu’il avait reçus. Les Israélites regardaient le visage de Moïse et voyaient que la peau de son visage rayonnait ; et Moïse remettait le voile sur son visage jusqu’au moment où il entrait pour parler avec le Seigneur.” (Ex 34, 29-35)
La rencontre véritable avec le Seigneur ne laisse pas indemne le visage de l’homme. Celui qui fait la rencontre personnelle avec Dieu, celui qui se blottit dans l’intimité divine et qui partage déjà sur la terre les biens célestes que Dieu offre par sa grâce, celui-là porte déjà sur son visage la marque de la lumière divine.
Notre visage n’est pas un masque, qui nous servirait à cacher qui nous sommes. Au contraire, notre visage est cette interface qui nous ouvre à la communion et à l’universalité. Un visage est toujours singulier, personnel, unique. Et c’est la rencontre avec Dieu qui change notre visage, et non pas un voile hypocrite, ou un masque de théâtre.
Alors pourquoi Moïse se couvre-t-il d’un voile ? C’est parce que l’Ancien Testament ne permettait pas une révélation complète du Seigneur, et que derrière ce voile la Révélation restait à venir.
Les Évangiles synoptiques rapportent ainsi cette manifestation de Notre-Seigneur à Pierre, Jacques et Jean :
“Six jours après, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et son frère Jean, et il les conduisit à l’écart sur une haute montagne. Il fut transfiguré devant eux ; son visage resplendit comme le soleil et ses vêtements devinrent blancs comme la lumière”. (Mt 17, 1-2)
Ici plus de voile. Le visage humain s’éclaire totalement du visage de Dieu.
C’est à retrouver en nous la lumière de ce visage divin que nous invite ainsi l’Église pour ce premier jour de carême. Que notre visage soit Son visage. Que notre joie soit Sa joie. Et cela par la rencontre personnelle avec le Seigneur, en nous tenant comme Moïse à l’écart du monde sur le mont Sinaï, c’est-à-dire dans ce lieu intime et inviolable qu’est la prière.